1 mars 2023

Autisme – Les compétences parentales font la différence !

L’autisme peut représenter un défi de taille pour les parents, qui peuvent se sentir isolés et démunis, confrontés à des niveaux de stress élevés, jusqu’à parfois déclarer des problèmes de santé. Cependant, de récentes études mettent en lumière l’importance de la compétence parentale pour améliorer la qualité de vie des parents d’enfants autistes.

>>> Télécharger l’article au format PDF <<<

Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) sont des troubles neurodéveloppementaux impactant les fonctions de communication, d’interaction sociale, de perception sensorielle et produisant des comportements répétitifs accompagnés d’intérêts restreints. Les TSA sont observables dès la première année de développement, mais ne sont généralement diagnostiqués que bien plus tard, vers 3-4 ans (dans le meilleur des cas).

L’éducation d’un enfant autiste est une tâche difficile pour les parents, qui peuvent être confrontés à des niveaux de stress élevés et des problèmes de santé. La recherche a déjà déterminé que les parents d’enfants autistes, et surtout les mères, développaient des niveaux de stress, de dépression et d’anxiété plus élevés que les parents d’enfants au développement ordinaire.

Une étude de septembre 2019 publiée dans la revue Invest Educ Enferm a examiné la notion de compétence parentale chez les parents d’enfants autistes. Les chercheurs ont effectué une revue systématique de la littérature disponible sur la question, et ont examiné des articles publiés entre 1974 et 2019, provenant de différents pays tels que les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et l’Iran. Ils en ressortent que la compétence parentale est l’un des éléments principaux pour améliorer la qualité de vie des parents d’enfants autistes.

Une basse perception de leur compétence parentale

Le sentiment de compétence parentale est la perception qu’un parent a de ses habiletés à s’occuper de son enfant, de répondre à ses besoins. C’est, en quelques sortes, la confiance en soi du parent dans son rôle de parent.

Les croyances d’un individu à l’égard de ses capacités à accomplir avec succès une tâche ou un ensemble de tâches sont à compter parmi les principaux mécanismes régulateurs des comportements. Ainsi, le sentiment de compétence renvoie aux jugements de la personne à propos de sa capacité à organiser et réaliser des ensembles d’actions requises pour atteindre des types de performances attendues

Sentiment de compétence parentale, participation parentale au travail scolaire et performances scolaires de l’enfant

Ainsi, dans le cas du suivi scolaire, un parent se percevant comme efficace dans son rôle de parent et faisant l’observation de la réussite scolaire de son enfant, verra ses comportements parentaux renforcés et plus à même d’être reproduits. “Le suivi scolaire influence les performances scolaires de l’enfant, mais celles-ci influencent à leur tour la manière dont les parents vont s’investir dans le travail scolaire de l’enfant.”

Or, cette efficacité parentale ne se retrouve pas de la même manière dans les familles avec enfants à besoins spécifiques, et tout particulièrement avec autisme. Le développement de l’enfant ne se faisant pas de manière ordinaire, il est parfois difficile pour le parent de comprendre les comportements de son enfant. Par ailleurs, les troubles dans la communication rendent difficiles les échanges. Les enfants peuvent éprouver des difficultés à exprimer leur colère ou leur frustration. Il en résulte une grande difficulté pour les parents à auto-évaluer leur compétence, ils ne savent pas quoi faire pour être de bons parents. Ils se sentent démunis, se considèrent comme de mauvais parents, peu efficaces dans leur rôle.

Une situation qui n’est cependant pas inéluctable

Les résultats d’études réalisées sur des parents d’enfants autistes, et en particulier des mères, ont révélé que plusieurs éléments pouvaient expliquer ce manque de sentiment de compétence parentale : le stress, la dépression, la santé mentale et physique des parents, le sentiment de culpabilité dû au handicap de l’enfant, mais aussi le manque de soutien familial ou social, la participation à des programmes collectifs de soins ou d’accompagnements, et le fait d’être soutenu par des professionnels. D’une manière générale, hormis l’état de santé global, le soutien aux parents est essentiel pour garantir leur compétence parentale.

Une étude belge de 2020 avait montré en quoi l’autonomisation, le développement de compétences (l’empowerment) était bénéfique pour les familles avec enfants autistes. Plus on développe des compétences – chez l’enfant et chez le parent – plus le niveau de stress et d’anxiété baisse, notamment parce que le parent est mieux outillé pour lire les comportements de l’enfant, les replacer dans leur contexte, et y apporter une réponse adéquate.

Dans le cas des TSA, ce soutien peut prendre la forme de groupes de parole (pour déposer le vécu et échanger des conseils), mais aussi des formations ou des séances de guidance individuelle. En se sentant soutenus, les parents prennent confiance dans leurs méthodes éducatives (ou d’accompagnement), et en tirent une meilleure efficacité. Les parents avec une meilleure confiance en eux ont montré plus de responsabilité, de patience, de sympathie et d’efforts pour développer des comportements appropriés chez leurs enfants et, par conséquent, étaient ainsi plus compétents pour en prendre soin.

Renforcer positivement les parents

Dans une autre étude, publiée en septembre 2021, des chercheurs australiens ont étudié la manière dont les professionnels de la santé interagissaient avec les parents pour augmenter leur compétence parentale. Il s’agissait pour les parents de filmer les exercices qu’ils réalisaient avec leur enfant, de revoir les vidéos avec les psychologues, et de renforcer positivement les bonnes pratiques qu’ils accomplissaient. Ce protocole d’accompagnement fut baptisé iBASIS-VIPP (iBASIS Video Interaction to Promote Positive Parenting).

Ils ont comparé deux groupes d’enfants très jeunes (entre 9 et 15 mois) présentant au moins une forme d’atypie : le premier groupe a suivi le protocole iBASIS-VIPP et l’autre a suivi un accompagnement classique. Les chercheurs ont remarqué que le groupe avec guidance parentale de type iBASIS-VIPP présentait une réduction significative dans la gravité des symptômes autistiques. En d’autres mots, le score de leur test diagnostic d’autisme baissait – notamment pour les critères A1 (déficience de la réciprocité sociale ou émotionnelle), B1 (stéréotypies et comportements répétitifs) et B4 (fonctionnement inhabituel du système sensoriel) du DSM-5.

Ainsi, en comprenant mieux les désirs ou frustrations de leur enfant grâce au protocole de guidance iBASIS-VIPP, les parents favorisaient davantage l’interaction sociale, prévenant l’apparition de troubles socio-émotifs plus handicapants. Avec de telles séances de guidance, les parents se sentent mieux informés de la particularité de leur enfant. Ils peuvent comprendre dans quelle séquence d’apprentissage ils ont bien ou mal agi. Cette méthode de renforcement positif sur l’éducation fait des parents les acteurs d’un processus thérapeutique, et leur donne un plus grand pouvoir pour agir sur leur enfant. Ils les comprennent mieux, et sont plus confiants dans leur compétence.

En conclusion

Il est aujourd’hui essentiel de proposer des méthodes d’accompagnement en phase avec les dernières données de la recherche scientifique. L’importance de la compétence parentale chez les parents d’enfants autistes a été peu, ou presque pas étudiée. On pensait, pendant très longtemps, qu’il fallait trouver la meilleure école, le meilleur centre, le meilleur praticien pour que l’enfant soit le mieux accompagné et qu’il développe le moins de troubles possible. Ces méthodes se basaient sur une conception aujourd’hui datée, celle que l’autisme serait une maladie et qu’il suffirait d’aller chez un bon professionnel pour la soigner. C’était sans compter que les TSA affectent tout le neurodéveloppement de la personne. Un accompagnement efficace et adapté est donc un accompagnement au plus près de l’enfant, c’est-à-dire dans toutes les interactions, en ce compris le domicile familial.

Le stress et l’anxiété provoquée par l’arrivée d’un enfant à besoins spécifiques a poussé beaucoup de parents à, soit se désinvestir de l’éducation de leur enfant, soit à se surinvestir. Dans un cas, comme dans l’autre, en résulte souvent un épuisement physique et moral. En travaillant sur l’autonomisation (empowerment) et en favorisant la compétence parentale, non seulement, nous améliorons les performances de chaque parent, sa compréhension et son interaction avec l’enfant ; mais aussi, nous offrons à l’enfant un cadre plus apaisé qui favorise son développement et limite l’apparition de troubles socio-émotifs.

Il ne s’agit donc plus de culpabiliser les parents pour avoir mis au monde un enfant différent, ni de chercher à vaincre l’autisme, mais il s’agit de donner aux parents le pouvoir de comprendre leur enfant, et d’en faire des adultes les plus autonomes possibles. Ceci ne pourra se faire tout seul, cela ne passera qu’avec un soutien adéquat des pouvoirs publics pour aider les parents à mieux faire face à leur rôle éducatif.

>>> Télécharger l’article au format PDF <<<

Sources

Carlier, S.; Van der Paelt, S.; Ongenae, F.; De Backere, F.; De Turck, F. Empowering Children with ASD and Their Parents: Design of a Serious Game for Anxiety and Stress Reduction. Sensors 2020, 20, 966.

Hastings RP, Symes MD. Early intensive behavioral intervention for children with autism: parental therapeutic self-efficacy. Res Dev Disabil. 2002 Sep-Oct.

Kuhn JC, Carter AS. Maternal self-efficacy and associated parenting cognitions among mothers of children with autism. Am J Orthopsychiatry. 2006 Oct.

Mohammadi F, Rakhshan M, Molazem Z, Gillespie M. Parental Competence in Parents of Children with Autism Spectrum Disorder: A Systematic Review. Invest Educ Enferm. 2019 Sep.

TAZOUTI Y, JARLEGAN A, Sentiment de compétence parentale, participation parentale au travail scolaire et performances scolaires de l’enfant, La revue internationale de l’éducation familiale, 2010/2 (n° 28).

Whitehouse AJO, Varcin KJ, Pillar S, et al. Effect of Preemptive Intervention on Developmental Outcomes Among Infants Showing Early Signs of Autism: A Randomized Clinical Trial of Outcomes to Diagnosis. JAMA Pediatr. 2021;175(11).

Powered by ©AASolutions new technologies 2023 - GAMP Contabo SelfHosted Website